Le Figaro – mardi 3 septembre 2019
ÉCONOMIE
CORINNE CAILLAUD
Alors que la question du bien-être au travail est omniprésente, le taux global d’absentéisme accélère sa progression. Il grimpe à 5,10 % en 2018, alors qu’il était de 4,72 % l’année précédente et de 4,59 % en 2016 selon l’étude quantitative Ayming-AG2R La Mondiale que Le Figaro dévoile en avant-première.
Ainsi, l’an dernier, un salarié était absent en moyenne 18,6 jours, contre 17,2 jours en 2017.
La hausse touche l’ensemble des secteurs d’activité, même celui des services qui avait amorcé une baisse en 2017.
Les arrêts de longue durée (de plus de 90 jours) bondissent de 10 %, le vieillissement de la population étant à l’origine de ce phénomène. À noter quand même la part croissante des arrêts longue durée chez les moins de 40 ans, qui pèse dans cette aggravation. La dégradation de l’absentéisme de plus de 90 jours est plus forte chez ces derniers (+ 23%) que chez ceux de plus de 41 ans (+ 9%). En cause, les restrictions de santé et les inaptitudes médicales, plus importantes aujourd’hui chez ces collaborateurs les plus jeunes qu’elles ne l’étaient chez leurs aînés au même âge. La médecine et ces jeunes salariés eux-mêmes prennent de plus en plus en compte les maux liés au travail. Si l’état de santé reste la première raison d’absence évoquée, il n’est pas la seule : la maladie professionnelle, les conditions de travail difficiles et l’épuisement sont également cités par les moins de 40 ans, montre l’étude. « Ces collaborateurs plus jeunes sont dans un rapport au travail moins sacrificiel que leurs aînés. Ils s’investissent autant qu’eux, mais ils ne sont pas prêts à avoir un impact sur leur santé liée au travail », relève Christophe Godefroy, directeur de l’activité ressources humaines chez Ayming.
Maintenir le lien
Ils sont aussi beaucoup plus sensibles à la notion d’éthique. Dès lors qu’ils perçoivent un décalage entre le contenu de leur travail ou les valeurs, tels que l’entreprise les leur a présentés, et ce qui s’y fait réellement, ils prennent du recul.
« Les entreprises doivent être plus à l’écoute de leurs collaborateurs et se montrer plus innovantes dans leur mode de management. Elles ne peuvent pas lutter contre ces évolutions sociétales », ajoute-t-il.
Jusqu’alors, les entreprises ont surtout tenté d’agir sur les arrêts courts, estimant qu’elles disposaient de davantage de leviers d’action. Désormais, elles doivent aussi prendre des mesures pour faciliter le retour de leurs collaborateurs en arrêts longue durée.
L’étude montre qu’au-delà de trois mois d’absence, les salariés ne sont plus que 31 % à se sentir mobilisés pour leur entreprise. Et 44 % des salariés interrogés assurent qu’aucune action n’est mise en place dans leur entreprise au retour du salarié absent.
« Il est important que le collaborateur se sente toujours impliqué dans l’entreprise et que celle-ci cherche des solutions pour faciliter son retour si sa santé le permet. D’autant que les salariés restent en contact entre eux et ce type d’initiative adresse aussi un message positif à ceux qui sont en poste. L’aspect humain est essentiel », poursuit Christophe Godefroy. Et l’étude d’en conclure que les entreprises « ont tout intérêt » à mettre des règles en place et à former leurs managers à la gestion de ces absences.
Le Figaro – mardi 3 septembre 2019