Témoignage de Christelle
Celle qui avait refait la déco de son bureau avec des centaines de post-it
Aujourd’hui, nous vous présentons Christelle, son expérience du burn out, et ce qu’elle en a fait.
Christelle a toujours été une femme déterminée à réussir. Architecte pendant plus de vingt ans dans une agence puis en libéral, elle fonce tête baissée quand on lui propose en 2014 un poste de responsable de patrimoine immobilier dans le secteur public. Dès son arrivée, elle sent que quelque chose cloche, sans pouvoir mettre de mots dessus. Elle travaille dans une équipe d’une dizaine de personnes, chacune autonome dans son poste. La charge de travail s’accumule rapidement, avec toujours plus de demandes, toujours plus de dossiers, toujours urgents. Christelle travaille déjà de 9 heures à 19-20 heures, mais pour absorber cette masse de dossiers, elle s’y remet désormais également le soir et le week-end.
En juin 2018, première alerte: Christelle fait un malaise en réunion, avec paralysie du visage. Elle est arrêtée une semaine, au cours de laquelle elle continue à répondre aux mails professionnels de son employeur.
Christelle court après le temps, son bureau n’est plus qu’un amoncellement de post-it… et de piles de dossiers qu’elle n’a plus le temps de ranger.
Elle reprend en septembre 2018, suite à un deuxième arrêt avant ses vacances d’été. A l’approche de son lieu de travail, la boule au ventre s’installe. Pour tenir, Christelle instaure une routine: elle prend un demi comprimé d’anxiolytique quinze minutes avant d’embaucher, et une fois sur place, elle s’enferme dans son bureau, pratique quelques exercices de respiration. Puis la journée marathon commence. Christelle court après le temps, accumule post-it sur post-it, en lien avec les multiples projets aux priorités changeantes qu’elle coordonne. Son bureau n’est plus qu’un amoncellement de post-it… et de piles de dossiers qu’elle n’a plus le temps de ranger. Elle interagit de moins en moins avec ses collègues, et prend désormais sa pause de midi seule. Elle se sent étouffer dans la prison dorée que représente ce poste en or : un beau statut, si bien payé, avec plein de vacances et de RTT… mais qui ne l’intéresse plus et qui la détruit à petit feu.
Et si ce n’était pas la panique?
Dès son retour des vacances en janvier 2019, rien qu’à l’idée de reprendre le boulot, Christelle vomit. Jour de la reprise. Boule au ventre. Anxiolytique. Respiration. Une collègue débarque alors sans frapper « pour une urgence ». Christelle s’effondre en larmes après avoir noté la demande sur un énième pos-it qui rejoint la collection qui tapisse son bureau. La collègue sort en s’excusant. Christelle sent son bras gauche se paralyser. C’est la panique. Elle avale un autre anxiolytique. Ça ne passe pas. Et si ce n’était pas la panique? Elle court à la médecine du travail. Le médecin lui ordonne de prendre rendez-vous le jour-même avec son médecin traitant, pour qu’il l’arrête. Christelle refuse, car elle a une réunion très importante dans l’après-midi. Mais le médecin du travail est catégorique: elle rentre chez elle. Le verdict du médecin traitant tombe: hypertension artérielle et épuisement professionnel grave. Arrêt maladie long.
La femme parfaite
Paradoxalement, Christelle est immédiatement soulagée : elle va enfin pouvoir s’éloigner de son travail, chez elle, en sécurité! Elle s’écroule sur son canapé et s’endort plusieurs heures. Son compagnon la réconforte. Dans les jours qui suivent, elle dort beaucoup. Dès le quatrième jour, Christelle se remet en action: elle recherche frénétiquement des offres d’emploi, car elle sait déjà qu’elle ne retournera pas à son travail. Les rendez-vous médicaux se succèdent en lien avec les manifestations physiques de son mal-être qui s’enchaînent: neurologue, orthoptiste, kinésithérapeute… En parallèle, elle se démène pour être la parfaite femme au foyer qui cuisine et tient sa maison à merveille, la femme idéale au poids au cordeau, qui fait du sport plusieurs fois par semaine et qui mange uniquement ce qu’il faut… Elle contrôle.
La rencontre des membres de l’association L’BURN et des BURN’ettes en mai 2019 est salvatrice. L’écoute attentive de Sylvie est réconfortante, les ateliers collectifs lui réapprennent à prendre du temps pour elle et à rencontrer de nouvelles personnes dans un cadre bienveillant. Christelle se rend alors compte qu’elle est « en train de rater son arrêt maladie ». Elle part en cure thermale, et s’autorise enfin à lâcher prise, à être moins exigeante envers elle-même, à ne pas trouver de solution immédiate. L’expérience « BURN’ette is back » en février 2020 l’aide à reprendre confiance en elle. Le groupe de BURN’ettes noue des liens amicaux au-delà du programme. Christelle sort avec ses nouvelles amies au cinéma, à des spectacles, elles se retrouvent autour d’un verre… Seule, elle continue la sophrologie, et les balades régulières au bord de mer lui offrent une évasion apaisante… Christelle se sent libre et en sécurité. Elle revit.
Lâcher-prise, dans le respect et la bienveillance
Aujourd’hui, Christelle a démarré un travail de groupe lui permettant de réfléchir à la construction d’un projet professionnel. Elle envisage un repositionnement, en lien étroit avec ses valeurs et ses besoins, comme le respect et la bienveillance. Elle a compris combien lâcher prise et accepter de « prendre le temps qu’il faut » est primordial pour amorcer la reconstruction. Elle puise son énergie du calme de la nature, et profite de chaque instant, au jour le jour, pour pouvoir s’engager avec plus de force dans cette voie parsemée d’autant d’obstacles que de petits bonheurs.
Christelle